mercredi 27 octobre 2010

Braque en bric-à-brac

Cela fait plus de deux semaines sans billet. Est-ce l'angoisse de la page blanche ? Pas assez de temps ? Rien à dire ? Est-ce qu'il fait trop chaud ? C'est la fin d'octobre, mais il fait si humide qu'on se met à suer aussitôt qu'on sort. Est-ce que la maison est trop encombrée de bric-à-brac ? Depuis plus de trois semaines nous partageons la maison avec les menuisiers qui rénovent notre cuisine; ils ont accaparé du sous-sol, de la salle à manger et de la salle de séjour. Leurs outils sont partout. Nous devons nous faufiler parmi eux pour trouver nos casseroles perdues dans le jungle qui était jadis notre demeure. Chaque matin, à 6h30 le travail commence par un nouvel assortiment de questions. Je dis oui et Chouchou dit non. Nous nous regardons interloqués et inquiets, et ensuite je dis non, et elle dit « non, n'est-ce pas ? » comme il va de soi. Je réponds non, mais c'est comme ça, c'est oui. La confusion continue, les menuisiers nous regardent et nous discutons. Je dis « Mais qu'est-ce que tu veux ? » Elle dit qu'elle ne sait pas. Je dis, moi non plus. Les menuisiers nous regardent les yeux de plus en plus écarquillés. Je ne sais comment ils supportent des bobos comme nous.

Juste après avoir résolu l'énigme du jour, Zanie, la voisine, entre dans la cuisine. Depuis la salle de séjour j'entends sa voix perceuse à percussion demander aux menuisiers de venir avec elle pour juste cinq minutes. Il y a une fuite aux toilettes. J'hésite entre intervention héroïque et fuite lâche, mais les mots comme « Bonjour Zanie. Quelle surprise ! Est-ce que vous voulez une tasse de thé vert ? Je mettrais de l'eau sur le poêle pendant que Freddie et Carl travaillent. Aujourd'hui ils vont peindre la cuisine », ils ne me viennent pas à l'esprit. Par contre, deux mots se répètent en boucle haut et fort, « Zanie ! NON !! ZANIE !! NON !!!»

Pour éviter une embrouille, je les laisse se débrouiller tous seuls. Le menuisier adjoint lui parlent à la voix humble, patentée et patiente. « Non, madame j'aimerais bien vous aider, mais je suis ici au compte de mon chef. » Elle insiste et répète que cela ne durerait que cinq minutes. Le menuiser chef vient à son secours, « Non, madame je ne sais rien de toilettes. Je connais un très bon plombier. Je peux vous donner sa carte de visite. » Elle insiste, insiste et insiste. Il écoute, écoute et écoute, mais il finit par couper court à la discussion, « Non madame, je ne peux vous aider. D'ailleurs nous sommes déjà en retard. »

Ensuite, je cherche notre chat Victoire. Pauvre bête. Il a une très mauvaise haleine à cause d'une infection dentaire. Quand il me voit le compte-gouttes à la main, il se détale. « Viens. Viens ici. Viens ! Petit monstre ! Reste tranquille et ne bouge pas ! » Je l'attrape et essaie de lui faire avaler sa médecine, mais le petit tigre met l'une de ses griffes acérées dans la cuticule de mon petit doigt. « Aïe !! »

Enfin, les tâches ménagères finies, j'essaie de me débarrasser de tout ce bric-à-brac mental et m'installe dans mon fauteuil. J'allume l'ordinateur, examine mon compte de courriel et essaie d'écrire, mais je n'en ai pas envie. Est-ce le crayon ? Où est le crayon ? Où est mon bloc-notes ? Est-ce que mon écriture à la main est illisible ? Est-ce que l'ordinateur portable ne me plaît plus ? Si j'avais une vieille machine à écrire ? Cela ferait un joli tic, tac, bric, brac, clic, claque, claque sur le papier. Serait-il plus pratique d'écrire avec une machine à écrire parce qu'un billet serait écrit et imprimé à la fois et ensuite prêt d'être examiné. Ce serait formidable ! Mais une vieille machine à écrire, une machine que je détestais à l'université, que je pensais ne valait rien, vaut plus de mille dollars aujourd'hui !

Au milieu de ma rêverie, Ronronfleur vient s'installer sur mes genoux. Comment puis-je écrire avec un chat qui se met entre moi et l'ordinateur ? Je mets une main sur son corps qui ronronne et l'autre cherche le souris sur le bureau et malheureusement elle chasse la tasse de thé au sol. Ronronfleur prend panique. Je la tiens et lui dit, « Ne me quitte pas, ne me quitte pas Ronron. Ronron ! J'ai besoin de ton ronron calme ! » C'est trop tard. Elle me quitte et je regarde un instant tout le bric-à-brac qui m'entoure, pousse un soupir, et me lève pour aller au travail.

dimanche 10 octobre 2010

Sommeil, fatigue et fin

Le week-end s'est envolé. Je l'ai passé à somnoler sur le canapé. Je suis si fatigué que lire le journal me semble un exploit herculéen. Deux semaines se sont écoulées sans avoir écrit un seul billet. Je voulais nager à la surface, trouver un asile dans le tourbillon, et parfois j'ai pu me hisser sur une petite île du temps, mais vite la fatigue et le sommeil ont mis fin au jour et j'ai dû tomber dans les bras de Morphée pour être bercé quelques heures. Des heures qui ne duraient jamais assez longtemps. Le prochain jour, j'étais au travail à 9 heures, et si j'avais de la chance, je rentrais avant 21 heures. Sinon, je rentrais à 23 ou 24 heures.

J'espère que les jours les plus durs se sont passés. Juste pour vérifer que la dernière phrase n'était pas un voex pieux, j'ai ouvert mon compte courriel au bureau. D n'a pas envoyé un message ce week-end. Je suis libre ! Au moins je serai libre après huit heures de travail. Libre ! Libre pour me demander ce que je fais dans ma vie, pourquoi je m'ennuie tout le temps, et comment je peux mener une vie plus simple et enfin arriver dans un équilibre tranquille sans ces questions bouleversantes.

Mais en effet, délester un peu dans ce déluge de travail, de stress, et de fatigue, c'était un soulagement. Les questions sur mon avenir, les questions existentielles, les chateaux en Espagne, l'imagination, j'ai tout lâché à l'eau. Et en contre-partie, j'ai regardé plus de télévision, de la télévision idiote. Tout d'un coup le match de football américain entre Washington et Green Bay m'a semblé très intéressant, et au même temps c'était juste pour ne penser à rien. Et ne penser à rien, c'est fermer lentement les yeux, c'est essayer de les rouvrir, c'est les laisser fermer en se disant qu'on est au bout du rouleau et demain on pourrait se remettrait en selle, peut-être.

Et maintenant, j'essaie d'écrire une paragraphe. Je n'ai besoin que de quelques mots qui auraient un soupçon de lien à une silhouette d'une idée qui intéresserait à un lecteur ou une lectrice au lieu de faire voir de toute évidence que cette idée fait dire à tout le monde une phrase qui vient de plus en plus vite à ma bouche, N'importe quoi ! Et si vous savez comment je déteste cette phrase qui répresente la fin de la patience et le commencement de l'abrutissement. Et voilà, la fin de la dernière paragraphe de ce billet. Je suis au bout du bouleau. Je n'ai rien plus à dire. Et qu'est-ce qui j'ai trouvé dans cet essai ?

Qu'au-dessous de l'énorme poids de la fatigue qu'un homme aussi bizarre comme moi peut enfin rejoindre la plupart de l'humanité qui ne veulent rien de plus que de voir un match de foot un dimanche après-midi et puis terminer son billet en se disant n'importe quoi.