lundi 24 mai 2010

La correction constante dans la maison de joie

Le cœur des sages est dans la maison de deuil; mais le cœur des insensés est dans la maison de joie. Ecclésiaste 7:4 Ostervald (1744)

En ce moment Je lis The House of Mirth par Edith Wharton pour mon groupe de lecteur. J'ai du mal à le lire. Les mots sautent des pages. Les descriptions sont sans intérêt. Elles ne sont ni médiocres ni mal écrites. Elles sont d'un autre monde où l'argent est roi, les femmes se manipulent les uns et les autres, les jeunes femmes sont un objet de convoitise, les épouses dépensent tout l'argent de leurs hommes dont elles se plaignent s'ils ne en gagnent assez pour maintenir leur respectabilité dans cette hiérarchie sociale.

Moi, je n'ai jamais eu un sou quand j'étais jeune par rapport mes semblables. Il est impossible d'imaginer pourquoi il faut s'intéresser à ces gens. Malgré ma résistance, j'entre-vois le dessein de ce livre. Il vous irrite. Il vous provoque. Et à mon avis, c'est la génie d'Edith Wharton. Elle nous tient un miroir où tout est beau et tout est moche.

À certains, ce miroir plaît. Récemment, grâce à un programme sur l'effet "Madame Butterfly" (oui, encore une fois !) j'ai découvert la source de ce plaisir pervers. Dans l’émission Mme Fukui a souligné très clairement que les occidentaux qui aimaient les orientales avaient des désirs louches, tandis que les orientales, qui ne désiraient plus les orientaux, étaient correctes. Plus tard dans l’émission un psychanalyste lui a dit que son attitude était pervers aussi. Et elle l'a compris aussi superficiellement que elle était capable, parce que si elle a bien compris le conseil du psychanalyste, je pense qu'elle aurait dû réorganiser la structure de son programme.

Naturellement, puisque ma femme, Chouchou, est japonaise, je voulais en parler avec elle. Je m'étais souvenu d'une fois où elle a dit qu'il était bizarre que beaucoup de mes amis se soient mariés avec des femmes asiatiques. Cela m'a gêné. Je me suis pensé « et alors, et qu'est-ce que tu penses de notre mariage ? » Mais, je l'ai laissé tomber. Elle n'aime pas mes amis. L'un m'a abandonné, l'autre est un grand névrosé. Il ne plaît pas aux gens correctes, mais il me plaît. Quelquefois, son végétarisme militant est trop obsessionnel. Ses mauvaises blagues gênent aux femmes. Son goût puéril est parfois un embarras pour ceux qui l'aiment. Par exemple, il est un type qui répéterait les avertissements des médicaments pour le traitement de l'impuissance sexuelle. « Après quatre heures, si vous avez une... » Ah, attendez. C'est moi qui, après quelques verres de vin, dirais des choses pareilles en tête-à-tête avec lui, mais lui voyant que cela a provoqué de l'hilarité, l'essaierait aux moments inappropriés. Il a une tendance de répéter les mêmes lignes de Star Trek, même après la transmission de la dernière épisode il y a quarante ans. Et il une habitude de se mettre presque sur moi quand il me parle. Tout cela tapent sur mes nerfs, mais il me fait l'aimer aussi.

Malgré tout ces mauvaises habitudes, il est honnête. Il m'offre une amitié profonde. Il n'est pas normal, mais il n'est pas louche. Quelquefois les deux sont assimilés et c'est injuste.

Chouchou a répété son opinion, qui était juste comme celle de Mme Fukui. C'était une absence d'une définition claire, une tache sur la réputation. Je lui ai demandé pourquoi il se faisait que les hommes sont louches, mais les femmes sont correctes. Selon elle, les hommes ont besoin d'une correction constante. Ce commentaire qui frôle la menace, s'est prononcé d'un air frivole.

Au moment que j'écris ces mots, Chouchou s'énerve contre le mot anglais Chinglish que j'ai écrit dans un cahier hier, parce que Sancho et moi avons parlé sur l'anglais que les Singapouriens mettent sur leurs pancartes. Ce mot frôle trop les injures qui ont l'air anodin, mais sont blessants. Elles n'ont qu'un seul but--exclure et préserver une hiérarchie sociale.

Et finalement, quel est le plaisir pervers de The House of Mirth ? C'est de s'imaginer dans la hiérarchie sociale, de choisir sa politique, et de s'insurger contre ses ennemis. Dans chapitre 11, Edith Wharton montre comment l'engrenage de la machine sociale marche. Lily, désargentée, fréquente un homme marié pour des conseils financiers. Il lui offre de mettre un peu de son argent dans la bourse. Selon sa méthode, il n'y aurait pas de risque. Il lui demande seulement juste quelques petits soins de Lily envers lui-même et son ami juif crapuleux qui a beaucoup de bons tuyaux. Entretemps, Lily a fait l'erreur d'exclure sa cousine d'une fête parce qu'elle n'était pas aussi élégante qu'elle, et la cousine, elle avait une dent contre Lily. Chez la cousine, c'est un œil pour œil, dent pour dent. Elle a rendu visite à leur tante, et pendant la conversation, Grace a laissé entendre que les femmes parlaient de Lily. Edith Wharton a souligné que Grace visait à s'insérer dans les bonnes grâces de sa tante par la destruction de la réputation de Lily. On a vu l'engrenage de la machine sociale broyait le caractère d'une mondaine. C'est une lutte à mort. C'est un combat moderne de gladiateurs.

Cette espèce de divertissement est présent dans beaucoup de séries télévisées--Desperate Housewives, Gossip Girls, les télénovélas. Je suis trop paresseux de les nommer toutes.

L'ironie est que de nous deux, Chouchou est beaucoup plus enracinée dans la vie washingtonienne. Elle se décrit comme une belle du Sud, (a Southern belle). Elle appartient à un quintette. Elle a un bon rapport avec sa patronne qui l'invite aux fêtes familiales. Elle veut même rester ici à Washington, DC. A part de ces racines, elle ne s'intéresse pas à d'autre chose. Moi, j'ai parcouru l'Alliance française, les groupes de lecteur, les groupes de conversation française, les associations, et même les groupes de ping-pong. A chaque reprise, il était un désastre. Quelquefois, j'amène Chouchou contre son gré à ces réunions. Elle me dit deux choses contradictoires. C'est une perte de temps et il lui a fallu beaucoup de temps pour trouver son petit monde musical. Elle a eu une traversée du désert. Et malheureusement son seule compagnon était cette correction constante.

Alors, je crois qu'enfin ma fièvre a baissé. J'ai déjà dit toutes mes observations à Chouchou. Elle m'a compris. C'était la première fois que j'ai pu dire du mal sur Desperate Housewives. La correction constante, serait-elle en passe d'être rendue caduque ?

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