samedi 13 mars 2010

Dans le métro

Chaque jour je prends le métro. Dans la station du coin travaille une femme âgée qui s'appelle Mrs. Wilkins (ou quelque chose comme ça). D'habitude je n'aurais ni l'occasion ni l'envie de faire la connaissance d'un directeur quelconque d'une station de métro. A Washington, bien que la ville soit plutôt petite (la population de la ville de New York est 14 fois plus grande que la nôtre), il y a trop de monde dans les stations à l'heure de pointe pour se faire remarquer et pour remarquer quelqu'un. Dans une ville plus petite, peut-être serait-ce un acte de gentillesse de faire un geste de reconnaissance, mais ici même avec les meilleures intentions, cela peut arriver à un mésentente, voire témoigne de l'agressivité. Du coup, j'ai l'habitude d'entre le métro tête baissée, mais à cause de ma curiosité ou de ma joie de vivre, je veille l'occasion de transgresser cette loi d'anonymat obligé et me permets un sourire, un regard dans les yeux d'autri, même un bonjour.

Je ne veux pas dire que les formules de courtoisie ne se disent pas. Dans le train, il y existe. On fait de la place pour les gens blessés, vieux, ou handicapés. On dit merci après qu'un passager laisse passer quelqu'un. Pas tout le temps, mais la politesse vit et elle est comprise presque de la même manière par tous les passagers.

Mais Mrs. Wilkins, comme je n'arrive jamais à vous comprendre !

D'habitude, elle est dans le bureau ou à l'appareil ou à l'écoute d'un passager. Je la guette du coin de l'oeil. Quelquefois j'essaie de fixer mon regard sur elle, mais sans faille elle m'ignore. Je suis invisible quand je suis dans le couloir, quand je m'approche du compteur, et quand je sors du compteur, mais dès que je lui tourne le dos pour aller attraper le prochain train, elle me lance un 'bonjour' sans chaleur ni sympathie. J'imagine qu'elle veut dire « j'existe, je suis quelqu'un et je suis là pour piquer tout le monde dans le dos qui à mon avis ne mérite même pas ma courtoisie raffinée. »

Avant que je ne me sois installé à Washington, jamais dans ma vie n'ai-je eu le plaisir de goûter ce drôle de courtoisie douce-amère. En tout cas, il faut dire que Mrs. Wilkins est arrivée à trouver un moyen parfait de transgresser cette loi d'anonymat obligé. Prenez une forte dose d'agressivité et y ajoutez une petite formule de politesse. C'est comment les gens de Washington rendent leur grande population plus petite.

1 commentaire:

m adele a dit…

Comme nous avons un metro flambant neuf, je comprends votre demarche, votre envie de communiquer, plus difficile si le metro est bonde. La, il vaut mieux mettre de la distance.