mercredi 31 mars 2010

Les deux oiseaux du bureau

Aujourd'hui deux oiseaux du bureau m'ont rendu visite. Ils ne sont pas vraiment oiseaux. C'est que leurs façons de parler me font penser à un animal qui vous regarde sans ciller et puis sans avertissement ils commencent à vous parler. Les écouter et les comprendre, c'est comme chasser et saisir un oiseau au filet à papillons. On les regarde, et les regarde encore. On ne leur dit rien, et surtout quand on s'approche d'eux. On ne les quitte jamais des yeux, mais en revanche en ne les regarde jamais droit dans les yeux. L'énigme de leur regard paralyse le chasseur le plus habile, et puis ils s'envolent loin avant que l'on ne soit arrivé à plusieurs mètres d'eux. Et dire que jusqu'alors l'on n'aurait jamais pensé qu'ils étaient sur le bord de partir.

Si vous n'arrivez pas à saisir mes propos et que vous n'avez pas de filet à papillons, essayez-le avec un appareil photo. C'est sûr que vous arriverez comprendre la difficulté de s'entendre bien avec les oiseaux du bureau.

Vers une heure le premier oiseau a sautillé dans mon bureau. On s'est dit bonjour, puis nous nous regardions. Moi, l'être humain, derrière mon bureau et jojo, l'hibou, muet et surnaturellement calme devant moi. Je lui ai regardé dans les yeux pales et vite frappé de paralysie par l'énigme. Dans ma stupeur je me suis demandé « Qu'est-ce que j'y vois ? » Je me suis remué la tête, me suis frotté les yeux, et j'ai patienté. Et, puis, rien. Est-ce qu'il va parler ? Quoi ?

« Oui, qu'est-ce ce qu'il y a ? Comment allez-vous Jojo ? » je lui ai enfin demandé. Comme si ma voix a dû lui surprendre, il a remué une aile, lentement et avec caution, puis il m'a dit, « Oui, je pense que, oui, selon Bruno, il dit que, il y a mainte façons d'arriver à expliquer les différences entre les deux méthodes, et les deux sont mauvaises... » je lui ai laissé parler, mais enfin j'ai dû l'interrompre, mais pas avant que je n'aie mis ma tête sur la table, ni avant que je ne me suis adossé loin dans ma chaise, mais jusqu'à ce que ma pauvre cervelle m'a hurlé de lui arrêter avant que je ne doive courir la pharmacie pour une ordonnance du médicament ADHD.

« Mais, il faut dire que je ne comprends rien de tout de ce que vous avez dit Jojo ? Pourquoi faut-il me dire tout cela ? » je lui ai demandé. Après quoi, il a tout recommencé, et ensuite il a sorti une feuille de papier. A ce point j'ai deviné qu'il s'agissait d'un courriel que j'ai envoyé à mon chef il y a trois jours, et il était là pour me donner son avis là-dessus. Il pensait bien répéter tout ce que disait Bruno, un autre salarié, et il essayait de répéter ses propos au pied de la lettre. Je connaissais tout l'avis de Bruno. Il semblait que j'étais au centre d'un jacassement étourdissant des gens qui parlaient sans réfléchir et pour éviter la folie, il fallait que mon chef, Bruno et lui me comprissent. Je l'ai arrêté encore une fois et lui ai insisté, « J'ai été très bien patient de vous écouter Jojo, et je comprends exactement ce que vous pensiez me dire. » Il a clignoté deux ou trois fois, puis il a dit, « Oui. » J'ai dû essayer encore une fois d'expliquer le problème et ma solution, puis il a convenu de dire que j'avais raison et qu'il fallait nuancer les propos dans le texte d'une lettre adressée à un client au lieu de lui écrire un tas d'absurdités et de contradictions.

Juste quand j'ai pensé que nous étions d'accord, jojo voulait me dire qu'il comprenait très bien tout avant son arrivée dans mon bureau. L'oiseux petit et méticuleux répétais tout ce que je lui disais tout à l'heure et il m'était impossible de me débarrasser de lui, même quand je lui ai dit, « C'est bien. Vous voyez comment ça marche. On a bien resolu l'énigme. » « Oui, c'était exactement comme je le pensais. Cela marche... » et ensuite il a utilisé les même paroles que je venais de lui dire. « Ah, oui. C'est donc bien terminé, nous sommes d'accord, » j'ai essayé encore une fois. Mais il n'a pas laissé tombé la proie de son bec. Il m'a répété toute l'histoire encore une fois. « Bon » je lui ai dit, un sourire agacé figé sur mon visage, j'ai patienté en voyant son regard vide et absent, puis je lui ai dit « Merci, au revoir. » Mais l'oiseau adore chanter la dernière note, « Oui, bon, c'est bien fini, merci pour votre compréhension. Au revoir. » Je lui ai regardé interloqué les yeux rivés sur lui et la paralysie de l'énigme s'est emparé de tout mon esprit. A ce point, je ne sais pas comment il est arrivé à quitter mon bureau. La dernière chose que je me souviens était que nous nous sommes regardé et puis il a dû s'envoler sans avertissement.

Deux heures plus tard DJ m'a rendu visite. Il est un oiseau de tout autre plumage. Ses gestes sont rapides. Il sourit souvent, il a les yeux vifs et alertes, mais ses propos sont aussi décousus que ceux de Jojo.

Attendre la suite !

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